Trois questions autour de l'eau
On disait que l'eau serait l'un des grands sujets du Sommet. Johannesburg lui a en tout cas a offert un bel espace dans son «Waterdome».
Sur ce thème, Philippe Roch, directeur de l'Office fédéral suisse de l'environnement, des forêts et du paysage.
swissinfo: Philippe Roch, dans ce «Waterdome», vous avez coorganisé une table ronde où il était question d'écosystèmes...
Philippe Roch: Oui, parce que la Suisse a l'ambition de développer un partenariat international pour la protection de ces écosystèmes.
Quand on parle d'accès à l'eau, mon souci à moi, environnementaliste, c'est qu'il y ait de l'eau dans les tuyaux et au bout du robinet.
Mais si on continue de déboiser, d'assécher les marais, de pratiquer une agriculture intensive qui détruit les sols, il n'y aura plus d'eau propre, il n'y aura que des inondations et des sécheresses.
Les écosystèmes et les forêts ne joueront plus leur rôle d'éponge en retenant l'eau après la pluie et en la redistribuant lentement. C'est un phénomène fondamental qui assure l'approvisionnement en eau à long terme.
Sur le plan international pourtant on néglige cette fonction primaire des forêts, des zones humides et des marais. Mon action vise à faire le lien entre la conservation de ces écosystèmes et la gestion de l'eau jusqu'à sa distribution aux populations.
Le Sommet a accepté de diminuer de moitié d'ici à 2015 le nombre de personnes qui n'ont pas l'accès à l'eau et à des infrastructures d'assainissement...
Ph.R.: C'est un bel objectif, mais si l'on veut maintenir cette ambition à long terme, il faut également penser aux forêts.
Prenez le cas d'une entreprise privée qui contribue à l'assainissement d'une région et la distribution de l'eau. Si c'est une vraie contribution économique à la solution du problème, tant mieux.
Mais il faut que cette entreprise prenne aussi en charge les frais de conservation durable des forêts et des zones humides. C'est toute cette chaîne qu'il faut réaliser.
Et, dans la foulée, que penser de la privatisation de l'eau en Suisse?
Ph.R.: Que Coca Cola rachète Walser me fait mal au cœur, mais je n'ai rien contre la privatisation si elle se réalise dans un cadre qui respecte le devoir de payer la ressource elle-même et de mettre sur le marché un produit de qualité et d'un prix raisonnable.
L'État doit garantir que le mécanisme de l'économie privée ne conduise pas à des accaparements. Avec l'eau, c'est inadmissible.
L'économie a ici un devoir de contribuer à une gestion et une distribution de l'eau qui respecte le droit fondamental des gens de bénéficier de cette ressource naturelle.
Une entreprise privée peut très bien contribuer à une gestion sociale de l'eau, mais elle doit assumer toute la responsabilité de la gestion de l'eau et pas seulement prendre les bénéfices au robinet!
swissinfo/Bernard Weissbrodt à Johannesburg

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