Test zurichois pour la nouvelle Crossair
Les Zurichois se prononcent ce week-end sur les 300 millions de francs que le canton souhaite investir dans la nouvelle compagnie aérienne nationale.
Près de trois milliards de francs suisses: c'est ce que doit peser au décollage, prévu pour le printemps prochain, la nouvelle Crossair, transformée en compagnie aérienne intercontinentale. Une formidable augmentation de capital, à laquelle participe le secteur privé (1,7 milliard), la Confédération (600 millions), mais aussi les cantons, à hauteur de 400 millions.
Les cantons? C'est en fait Zurich qui se charge de la part du lion. Le gouvernement cantonal propose, en effet, d'injecter 300 millions dans le capital de Crossair.
Il souhaite également pouvoir, en cas de besoin, aider l'aéroport à assurer son bon fonctionnement. Une garantie qui pourrait aller jusqu'à 100 millions de francs. C'est sur ces deux propositions que les Zurichois doivent se prononcer, ce week-end.
Un éventuel redimensionnement
Et leur verdict va compter. Car, pour l'instant, seuls les deux Bâle, ville et campagne, ont effectivement versé leur contribution (en tout 31 millions). La quinzaine d'autres cantons vont sans doute suivre.
Comment pourraient-ils, en effet, comprendre que le principal intéressé, le canton qui abrite le hub de Kloten, renonce à passer à la caisse? Certains d'ailleurs, comme Lucerne ou Schaffhouse, ont formellement lié leur participation à celle des Zurichois.
Les dirigeants de Crossair ont pour leur part déjà averti: un non zurichois pourrait entraîner un redimensionnement du projet Phoenix, qui table toujours sur la reprise de 26 long et 26 moyen-courriers de Swissair.
«Cela voudrait dire en principe, précise Markus Baumgarnter, porte-parole de Crossair, 3 ou 4 long-courriers de moins». C'est-à-dire des centaines de nouvelles suppressions d'emplois.
Les Verts et l'UDC contre
C'est justement par l'importance économique et sociale de l'aéroport de Kloten que le gouvernement zurichois justifie principalement cet investissement. Or, dit-il, seul la naissance d'une nouvelle compagnie aérienne suisse permet de garantir le maintient d'un hub intercontinental et de ses avantages en termes d'attractivité. Dans le cas contraire, la facture économique se monterait à «des milliards».
Des arguments ont fait mouche au parlement cantonal. A la mi-novembre, radicaux, socialistes et démocrates-chrétiens se sont unis pour faire passer le crédit de 300 millions, par 101 voix contre 67.
Mais ils n'ont réussi à convaincre ni les Verts - qui refusent de subventionner un mode de transports à leurs yeux bien peu écologique - ni surtout l'Union démocratique du centre.
Pas d'intervention de l'Etat
Trop cher payé pour un projet qui n'est de toute façon pas viable, explique en substance Alfred Heer, député cantonal du parti de Christoph Blocher, et président de l'Union des contribuables (Bund der Steuerzahler). Et puis, pour l'UDC, c'est une question de principe: l'Etat n'a pas à intervenir.
«Tant qu'il y aura des gens qui voleront depuis Zurich, il aura des compagnies aériennes qui desserviront cet aéroport. Ca ne sert à rien de payer des subventions, uniquement pour pouvoir dire qu'on a une compagnie helvétique», ajoute Alfred Heer, en repoussant le scénario de la catastrophe économique.
Besoin de confiance
Alors, oui ou non aux 300 millions? Il faut maintenant attendre jusqu'à dimanche pour connaître le verdict du peuple zurichois. Reste qu'au-delà des questions d'augmentation de capital, de participation financière, ce scrutin constitue le premier test de popularité de la nouvelle Crossair.
Comme le confiait son président, le Neerlandais Peter Bouw, dans une interview parue dans le magazine l'Hebdo, peu avant Noël: «L'argent est important, bien sûr, mais nous avons également besoin de la confiance que nous signifiera ce vote.»
Pierre Gobet, Zurich

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