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Histoire

Quand les anarchistes terrorisaient la Suisse

Un regard sur l’histoire de la Suisse montre que ce pays a connu bien plus d’actes de violence politique que ce dont on se souvient généralement. Mais la peur que ces attentats terroristes a suscité dans la population a été bien plus grande que les dommages réels qu’ils ont causés.

Ce contenu a été publié le 05 juin 2020
David Eugster, Andrea Caprez (illustration)

En septembre 1898, Elisabeth, impératrice d’Autriche et reine de Hongrie (la fameuse Sissi), se promène avec sa dame de compagnie sur les quais de Genève. Un inconnu se précipite sur elle et lui enfonce une lime à ongles dans le cœur. Elle ne ressent qu’une petite piqûre, mais tombe évanouie et meurt quelques heures plus tard.

Cet assassinat est considéré comme le premier attentat politique de l’histoire de la Suisse moderne. Son auteur, l’Italien Luigi Luccheni, est un anarchiste déclaré. Il est l’un des nombreux adeptes de ce courant de pensée à qui la Suisse donne à l’époque refuge. Depuis les révolutions avortées de 1848, le pays offre l’asile politique à ceux qui luttent contre les monarchies européennes. C’est un sanctuaire de premier plan pour les anarchistes, si ce n’est même le berceau de l’idée d’anarchie.

Et la lutte ne se livre pas toujours au-delà des frontières, le gouvernement suisse est aussi dans le viseur: dans les années 1880, un anarchiste menace de faire sauter le Palais fédéral.  

Bien des anarchistes présents en Suisse se sentent obligés de faire leur propagande par l’acte et commettent des attentats. «Nous n’avons pas d’argent pour faire bouger les masses. Nous devons donc commettre des actes marquants qui servent le même but», explique l’anarchiste russe Isaak Dembo lors d’un interrogatoire de police. Il est alors soupçonné d’avoir utilisé un laboratoire de l’École polytechnique fédérale pour construire des bombes.

Plusieurs procès d’anarchistes tenus en Suisse attirent l’attention internationale, comme celui de Tatjana Leontieff, qui en 1906 a exécuté un homme d’affaires français dans un grand hôtel d’Interlaken. Elle l’avait confondu avec le ministre russe de l’Intérieur. Le jury composé de paysans locaux lui inflige une peine clémente en raison de sa capacité de discernement défaillante.

La goutte d’eau qui fera déborder le vase, c’est l’attaque d’une banque à Montreux en 1907 durant laquelle les anarchistes abattent un jeune caissier. Après leur arrestation, les braqueurs sont presque lynchés par la foule, qui réclame la peine de mort.

En réaction à cette vague de violence, des appels répétés sont lancés en faveur d’un durcissement de la loi sur l’asile. Une des réactions est la loi dite «sur les anarchistes», qui en 1894 fait de la fabrication de bombes un crime.

Mais le principe de base reste clair: la Suisse ne doit pas abandonner «l’idée de la liberté en Europe», écrit alors le journal Neue Zürcher Zeitung: «On peut traquer des gens désespérés de pays en pays, mais un jour l’occasion s’offrira à eux et ils en profiteront autant qu’ils le pourront. Il peut être humiliant pour nous de penser que nous pourrions ne pas être en sécurité malgré l’éclat de notre civilisation, mais c’est ainsi, et nous ferions bien de le reconnaître».

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