Polémique autour de l'inculpation de Friederich
L'avocat de Peter Friederich estime que son client n'est pas inculpé. Une chose est sûre: l'ambassadeur n'a pas été traduit devant un juge d'instruction.
Le 11 juillet dernier, le Ministère public de la Confédération (MPC) annonçait que l'ambassadeur de Suisse au Luxembourg avait été appréhendé trois jours auparavant. Et qu'il était soupçonné de blanchiment d'argent.
Aujourd'hui, Peter Friederich est toujours en prison. Sa détention a été prolongée jusqu'au 15 août.
Mais le diplomate suisse a-t-il été formellement inculpé de «blanchiment» et de «faux dans les titres»?
A cette question, le porte-parole du MPC répond «oui». Mais, dans le même temps, Hansjürg Mark Wiedmer insiste sur la présomption d'innocence dont bénéficie le diplomate.
Autre son de cloche chez l'avocat de Peter Friederich. A en croire Jean-René Mermoud, son client n'est toujours pas inculpé.
Et l'avocat de préciser que, pour l'instant, l'ambassadeur est seulement soupçonné de blanchiment dans le cadre d'une enquête menée par le Ministère public de la Confédération.
Trois semaines sans réponse
Alors, Peter Friederich est-il oui ou non inculpé? Trois semaines après son arrestation, il peut paraître pour le moins curieux que l'on ne puisse pas répondre clairement à cette question.
«Mon client, souligne Jean-René Mermoud, n'a pas été déféré devant un juge d'instruction qui lui aurait notifié son inculpation.»
Depuis mercredi, l'ambassadeur de Suisse au Luxembourg a d'ailleurs décidé de ne plus collaborer avec le MPC.
Peter Friederich proteste ainsi contre la décision de la chambre d'accusation du Tribunal Fédéral de prolonger sa détention jusqu'à la mi-août.
Une détention qui aurait «sérieusement affaibli» la santé «physique et morale» de l'ambassadeur, à en croire son avocat.
Le système alémanique est différent
Pour Dominique Poncet, ténor du barreau de Genève et professeur de droit, cette situation n'est pas concevable à Genève.
En effet, dans la Cité de Calvin, pour être sous mandat d'arrêt, il faut avoir été inculpé par un juge d'instruction.
«Le système alémanique est différent, note toutefois l'avocat genevois. De l'autre côté de la Sarine, le procureur possède en même temps une fonction d'instruction.»
Toutefois, comme toute procédure pénale classique, la procédure pénale fédérale doit respecter la Convention européenne des droits de l'Homme.
Et que dit cette Convention? «Que toute personne privée de sa liberté doit être conduite à brève échéance devant un juge», commente Dominique Poncet.
Encore faudrait-il s'entendre sur la signification de l'expression «brève échéance». S'agit-il d'un jour, d'une semaine, d'un mois?
Pour Regina Kiener, les choses sont très claires. Selon le professeur de droit public à l'université de Berne, toute personne mise en détention «doit être traduite devant un juge d'instruction».
D'ailleurs, cette condition-là figure noir sur blanc dans l'article 31 de la Constitution fédérale, comme dans l'article 5, alinéas 2 et 3 de la Convention européenne des droits de l'Homme.
Abusé par un proche
Ainsi, dans le bureau d'un juge, le Ministère public de la Confédération ne devient plus qu'une des parties de l'enquête. Il peut se voir refuser certains actes.
Quant à la personne inculpée, elle a accès au dossier. Ce qui n'est pas le cas de Jean-René Mermoud, le défenseur de Peter Friederich.
Or, l'avocat continue à démentir toutes les accusations portées contre Peter Friederich.
Selon lui, l'ambassadeur reconnaîtrait seulement avoir été abusé par l'un de ses proches.
Et de préciser: depuis des années, en dehors de ses activités de diplomate, Peter Friederich réaliserait des placements financiers et ferait bénéficier ses amis de ses compétences financières.
swissinfo/Ian Hamel

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