Le drôle de change en euro des commerces suisses
La plupart des magasins acceptent l'euro. Certains appliquent un taux de change frisant l'arnaque. Etude empirique chez des commerçants genevois.
Le visiteur étranger en provenance de la zone euro risque d'être pour le moins perplexe à son arrivée en Suisse. Dans le pays des banques et de la haute finance, trois jours après l'introduction de la nouvelle monnaie, les commerçants et les bureaux de change cherchent encore leurs marques face au cours de l'euro.
Des écarts de 4%
A Genève, jeudi, le bureau de change de la gare CFF affichait un taux euro/franc de 1,42 à l'achat et de 1,54 à la vente. En clair, il vous donnait 1,42 franc suisse contre un euro, mais pour obtenir cette même pièce vous deviez débourser 1,54 franc.
A l'UBS, le prix d'achat était de 1,457 et celui de vente de 1,5175. A la banque Migros le cours de l'euro se fixait à 1,4625 et 1,5125. Mais le meilleur taux observé se trouvait dans un petit bureau de change en face de la gare qui offrait 1,48 franc pour un euro et demandait 1,494 franc à la vente.
Si on compare les divers taux de change proposés, la différence va jusqu'à 4%. Enorme dans un secteur où l'on compte en millième. Un tel écart entre concurrents n'est pas habituel sur une monnaie issue d'un pays industrialisé.
Les magasins pataugent
Surprise similaire du côté des commerces. Tous les grands magasins et de nombreux petits commerçants acceptent l'euro, mais la plupart refusent les pièces et rendent la monnaie en francs suisses. Le problème c'est que la gabegie règne quant au taux de change à appliquer.
La palme de l'excellence revient à la Migros. Le cours est affiché en grand au service client et il est très favorable pour le consommateur puisqu'un euro vaut 1,50 franc. Pas sûr que le géant orange maintienne longtemps ce bon taux.
Ailleurs il faut se renseigner auprès des caissières. «A la Coop, le cours est de 1,44», annonce après mûre réflexion un employé. Chez Manor, un euro vaut 1,45 franc. Au McDonald's la caissière sait que le fast-food accepte l'euro mais est incapable d'en préciser le taux. «C'est pas trois fois le franc», lance-t-elle. Le manager rétablira le cours maison à 1,40.
Le règne du flou
Dans les kiosques de la gare c'est le flou qui domine. Chez Relay, une vendeuse annonce qu'un euro vaut 1,20 franc avant de préciser qu'en fait, elle attend des ordres de la direction. A ce niveau-là, ce serait de l'arnaque.
Chez Naville, l'employé précise «qu'on ne prend pas les euros pour l'instant mais c'est pour bientôt». Dans le tabac voisin, le gérant propose 1,35 franc. «C'est mon taux personnel pour rendre service et pour couvrir mes frais».
Il semble donc qu'il ne soit pas si simple pour les commerces suisses de se familiariser avec la nouvelle monnaie. Reste que ce flottement est normal tant la révolution est grande. D'ici quelques semaines, passée la période d'adaptation, les écarts de taux de change devraient s'estomper, tant au niveau des banques que des magasins.
Luigino Canal

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