La crise pousse les Argentins vers l'Europe
En pleine crise sociale, le président argentin démissionne. Les habitants, eux, fuient leur pays. Ils cherchent un refuge, en Suisse notamment.
«Depuis une année, le nombre d'Argentins fuyant leur pays augmente sans cesse, pour atteindre un niveau comparable à celui de l'époque de la dictature», constate Silvia Hodgers, une chorégraphe argentine exilée en Suisse après avoir été embastillée et torturée par la junte du général Videla.
Son fils, le député vert Antonio Hodgers fait la même observation: «depuis quelques mois, je rencontre un nombre croissant de jeunes Argentins dans le circuit alternatif des squats genevois».
Ce flux de réfugiés économiques ne devrait pas tarir de si tôt. Entrée en récession il y a 3 ans, l'Argentine est aujourd'hui menacée par le chaos. Jeudi soir, le président Fernando de la Rua a démissionné. Un retrait annoncé par le ministre de la production.
La veille, le président avait décrété l'état de siège pour une période de 30 jours. Une décision censée mettre fin aux pillages et aux émeutes de la faim qui secouent l'ensemble du pays et qui ont déjà fait au moins 20 morts.
Le chaos menace
Mais jeudi, les manifestations ont continué. «A Buenos Aires, elles se déroulaient en matinée de manière pacifique», précise Armin Ritz, ambassadeur de Suisse en Argentine. Pour autant, il se refuse au moindre pronostique. La situation est particulièrement volatile.
Ecrasée par une dette publique de plus de 130 milliards de dollars, l'Argentine connaît 14 millions de pauvres et plus de 18% de chômeurs, selon les chiffres officiels. Le reste de la population n'est guère mieux loti: la moitié des salariés gagne moins de 400 dollars par mois.
Les entreprises suisses dans la tourmente
L'Etat, lui, est au bord de la faillite. D'ici la fin de l'année, le gouvernement doit rembourser plus de 700 millions de dollars et il n'a toujours pas réussi à obtenir l'aide des institutions financières internationales. «Pour obtenir cette aide, le gouvernement doit réformer en profondeur ses finances publiques», précise l'ambassadeur Armin Ritz.
Le changement attendu de gouvernement permettra peut-être de débloquer la situation. Mais l'économie argentine ne va pas, pour autant, se redresser rapidement.
Les entreprises suisses implantées dans le pays, comme Nestlé, Roche, Novartis, Sulzer, Ascom ou Hoderbank commencent donc à souffrir. Ce qui les sauvent pour l'instant, selon Armin Ritz, c'est leurs ventes dans les autres pays de la région.
Frédéric Burnand

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