Dialogue avec l'au-delà à Berne
«Est-ce que tu m'entends ?», demande une voix à peine audible. Le visiteur du Musée de la communication de Berne devra peut-être surmonter sa peur s'il veut aller au bout de «Goodbye & Hello: dialogue avec l'au-delà», la nouvelle exposition consacrée au paranormal.
Cette voix, c'est l'un des nombreux témoignages de contacts avec l'au-delà que présente le Musée de la communication de Berne. «Cette exposition est unique en son genre, explique son commissaire Kurt Stadelmann. Je pense que c'est la première fois en Europe que l'on expose ce genre d'objets et de phénomènes».
«Au début, poursuit-il, il a été très difficile de trouver des gens qui acceptent de participer. Ils ne voulaient pas parler de leur expérience parce que la communication avec l'au-delà est un sujet tabou. Ni l'au-delà lui-même ni la communication avec cette dimension ne sont prouvés et personne ne veut se risquer à dire que c'est réel».
Mais le défi d'exposer l'intangible n'a pas arrêté le musée. Résultat: cette exposition (presque) comme les autres, qui retrace les connexions supposées avec les morts rapportées en Suisse et ailleurs depuis les années 1800.
Proximité avec la mort
Des connexions qui prennent des formes multiples. L'exposition rappelle ainsi qu'au 19e siècle, il n'était pas rare d'utiliser des cheveux de défunts pour confectionner des décorations. Un usage qui trouve un écho à l'époque contemporaine avec l'utilisation de cendres pour faire des diamants.
Le musée revient aussi sur des témoignages de personnes ayant côtoyé la mort. Ainsi, Magdalene Bless, victime d'un accident de la route, dit avoir été «immergée dans une lumière magnifique» avant que sa vie apparaisse devant elle dans une «rétrospective rapide et colorée, avec tous les sentiments, odeurs et bruits qui y étaient associés.»
L'écrivain Albert Hein est l'un des premiers à avoir étudié les expériences de proximité avec la mort. Il a enregistré le témoignage de Magdalene Bless en vidéo.
Tentatives d'enregistrement
Mais le plus passionnant, ce sont peut-être les tentatives de certaines personnes d'enregistrer leurs contacts avec les morts. Ainsi, dans les années 80, l'Allemand Manfred Boden a vu ses conversations téléphoniques interrompues pendant plus de trois ans par des voix bizarres que lui seul entendait et qui répondaient à ses questions.
Il a enregistré trois cassettes de conversations. Quand il demandait à des ingénieurs, ceux-ci lui répondaient en que son téléphone fonctionnait parfaitement bien.
Manfred Boden a ensuite encore découvert que les relevés de ses biorythmes, qu'il faisait par ordinateur, étaient parsemés de commentaires. L'un d'entre eux était de mauvais augure: «Je suis ici, tu meurs, accident de Manfred le 16 août 1982».
Le jour en question s'est déroulé sans incident. «Avant que ces phénomènes paranormaux ne m'apparaissent, je me serais moqué de quiconque m'aurait raconté ce genre d'histoires, a raconte Manfred Boden plus tard. Mais après ce qui s'est passé, j'ai très vite perdu toute envie de rire».
Talents révélés
D'autres personnes ont entendu des voix autour d'elles. Le prêtre catholique Leo Schmid et l'ingénieur Viktor Bättig ont enregistré des sons sur des cassettes et ont publié des livres sur leurs expériences. Une voix a dit à Leo Schmid: «Je suis Van Gogh» et l'ingénieur capta un «Bättig, est-ce que vous m'entendez?»
D'autres encore disent avoir développé des talents artistiques particuliers grâce à des contacts surnaturels. Ainsi, Heinrich Nüsslein, de Nüremberg, a réalisé un tableau complexe en une demi-heure de transes. Au total, il a réalisé quelque 30'000 œuvres d'art et s'est nommé lui-même «peintre métaphysique.»
Dans les années 60, Rosemary Brown, une Londonienne veuve de son état, avait prétendu que les plus grands compositeurs de l'histoire de la musique lui dictaient de nouvelles œuvres. Elle a retranscrit des centaines de partitions et a même enregistré un album.
Joueurs d'échecs
Le clou de l'exposition, c'est la partie d'échecs jouée entre 1985 et 1993 entre Viktor Korchnoï, le grand maître le plus âgé de l'époque, et un ancien grand maître hongrois, Géza Maróczy, mort en 1951.
Robert Rollans, un médium, joueur inexpérimenté, avait été intégré à la partie, remportée par Korchnoï en 47 coups. Les résultats ont été publiés dans le «Journal of the Society for psychical research» en 2002.
Une autre perle de l'exposition est le couteau à pain du psychiatre suisse Carl Gustav Jung, dont il a raconté qu'il avait soudainement explosé en quatre morceaux, en 1898. Prêté par un collectionneur privé, l'objet est montré pour la première fois.
Pour les sceptiques
En fin de parcours, les sceptiques en ont aussi pour leur compte, avec une présentation de fraudeurs connus et l'exposé d'un scientifique démentant fermement l'existence de ces contacts avec l'au-delà.
«Tout le monde a un avis sur l'au-delà et nous essayons de montrer les deux positions extrêmes, indique Kurt Stadelmann. C'est au visiteur de décider ce qui est juste ou non à ses yeux.»
Certains visiteurs donnent leur avis. Un questionnaire rempli à la fin de la visite permet de constater que les femmes ont davantage tendance à croire à la vie après la mort et aux fantômes que les hommes.
«Nous vivons dans un monde logique, conclut Kurt Stadelmann. Personnellement, j'ai vu qu'il y a pourtant énormément de choses dans le monde qui restent inexplicables.»
swissinfo, Jessica Dacey
(Traduction de l'anglais: Ariane Gigon)
L'EXPOSITION
L'exposition «Goodbye & Hello» est divisée en trois parties: la communication des vivants avec les morts (par exemple par des faire-part de décès), celle des morts avec les vivants (apparitions) et les dialogues (par des médiums)
Le parcours évoque les considérations occidentales sur la mort et le contact avec l'au-delà.
Des experts donnent leur avis sur une maison supposée hantée. On peut aussi voir un film montrant des médiums en pleine séance de spiritisme. Ailleurs, des conversations téléphoniques sont interrompues par des voies presque inaudibles.
L'exposition donne aussi la parole à des scientifiques qui nient l'existence de ces contacts paranormaux et rappellent les cas de fraudeurs célèbres.
L'exposition est à voir jusqu'au 7 juillet 2009 au Musée de la Communication, Helvetiastrasse 16 à Berne.

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