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Alexei Jaccard: la Suisse a bien fait son travail, mais sans audace

La diplomatie suisse a traité le cas Alexei Jaccard (photo), disparu en 1977 à Buenos Aires, de manière exceptionnelle, mais a manqué d’imagination et de l’aide d’un service de renseignement. C’est la conclusion d’un rapport d’experts indépendants.

Ce contenu a été publié le 04 février 2000 minutes

La diplomatie suisse a traité le cas Alexei Jaccard (photo) de manière exceptionnelle, mais a manqué d’imagination et surtout de l’aide d’un service de renseignement. C’est la conclusion d’un rapport d’experts indépendants publié à Berne. Le ressortissant helvético-chilien a disparu dans des conditions mystérieuses, en 1977, à Buenos Aires.

Sans la pression de l’opinion publique, aiguillonnée par la presse, la disparition d’Alexei Jaccard ne serait pas devenue une quasi affaire d’Etat. De même, sans les enjeux économiques et la présence d’une importante communauté suisse en Argentine, le cas Jaccard n’aurait sans doute pas été traité au plus haut niveau des autorités, en Argentine et en Suisse.

Mais cette pression, ainsi que les nombreuses recherches entreprises par des ONG, n’ont pas permis d’élucider le mystère de la disparition d’Alexei Jaccard, en 1977, à Buenos Aires. Et tel n’était pas le mandat confié à Antoine Fleury, de l'Université de Genève, et de Dietrich Schindler, de l'Université de Zurich.

Ces deux historiens ont essentiellement passé au crible l’attitude de l’administration fédérale, lors de la disparition d’Alexei Jaccard, double national suisse et chilien. Et leur rapport, bien que nuancé, conclut à l’excellence du travail effectué par la diplomatie helvétique. Depuis la nouvelle de la disparition, la machine administrative a fonctionné à plein régime, usant de moyens classiques, et non sans une certaine naïveté.

Ainsi, les experts relèvent l’incroyable attitude de l’ambassadeur suisse de l’époque. Recevant, en 1977, une information, via une lettre anonyme indiquant le lieu où serait détenu le jeune Suisse, William Frei demande à la police argentine - au service d’un régime soupçonné de graves violations des droits de l’homme - de contrôler cette information.

Un couac qui s’explique notamment par l’inexistence d’un service de renseignement digne de ce nom. Ce que déplore vivement le professeur Antoine Fleury. L’autre signe d’un manque de punch se manifeste en 1978, lors de la rencontre, à Rome, entre le conseiller fédéral Pierre Aubert et le président argentin Videla, à la demande de ce dernier.

Le chef de la diplomatie suisse n’hésite pas à évoquer très largement, avec lui, le cas Jaccard, faisant mine de reléguer au second plan le règlement d’un contentieux financier. La Suisse souhaitait obtenir une large indemnisation des actionnaires suisses dans la nationalisation d’un groupe industriel. De son côté, le général Videla voulait régler ce problème afin d’attirer les investisseurs suisses. En 1978, les investissement directs étaient estimés à 380 millions de francs.

Sans parler de manque d’audace, les experts constatent que Pierre Aubert n’a pas saisi cette occasion pour demander de façon explicite au général Videla de procéder à une enquête. Au nom des bonnes relations entre leurs deux pays.

Jugurtha Aït-Ahmed

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